JOHNNY HALLYDAY : L’ÉTERNEL VIVANT : ÊTRE FAN AU-DELÀ DE LA MORT

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Quand l’idole s’éteint, que reste-t-il ? L’écho d’une voix, des souvenirs en feu, et un lien plus fort encore. Deux fans racontent comment Johnny Hallyday a bouleversé leur vie et continue de le faire, même après la mort.

Le 13 juin 2025, par Maïlys Lahirle-Prat (stagiaire) et Esther Benezech

Il est des personnalités qui laissent une empreinte indélébile, qui dégagent une aura singulière, un charisme puissant, une force intérieure hors du commun. Johnny Hallyday fut l’une de ces figures d’exception. Porté par une énergie débordante et une détermination sans faille, il fit de sa passion un moteur qui le conduisit au rang d’icône. Plus de 110 millions de disques vendus, 1 million de personnes présentes à ses obsèques à Paris, et près de 15 millions de téléspectateurs ce jour-là : qu’on soit fan ou non, Johnny ne laissait pas indifférent.

Bien au-delà du statut de chanteur, il est pour des milliers de personnes, un guide, un frère, parfois même une figure paternelle. Plus de sept ans après sa disparition, l’émotion reste vive. Mais qu’est-ce que le décès d’une telle icône change, ou pas, dans la vie de ceux qui l’ont tant aimé ? Les récits de Jacky, 75 ans, et d’Éric, 59 ans, témoignent d’un attachement profond, d’une fidélité à toute épreuve et d’un amour intact.

Naissance d’une passion

Jacky avait 11 ans. Éric, 13. Deux regards encore neufs sur le monde. Et deux rencontres saisissantes avec Johnny Hallyday. Pour Jacky, tout débute sur une grande esplanade, chez ses grands-parents. Un auditorium, une scène, et Johnny, ce soir-là, qui chante pour la première fois sous ses yeux. « Ce fut un électrochoc. » À une époque où l’on écoutait Tino Rossi ou Charles Aznavour, Johnny incarne la rupture, la liberté, l’avènement du rock’n’roll. « Il se roulait par terre sur scène. C’était tout simplement nouveau, moderne, transgressif. »

Pour Éric, c’est au Pavillon de Paris, en 1979. Son père l’y emmène presque par hasard. « Je ne le connaissais pas. Je l’ai vu, et tout de suite j’ai été scotché par sa prestance. » Il descend dans la fosse, happé, littéralement aspiré par la puissance du personnage. Un moment fondateur. Un “tilt”, comme il le dit, qui ne le quittera plus. Chez l’un comme chez l’autre, Johnny ne sera jamais uniquement un chanteur. Il deviendra dès leur premier concert, un compagnon d’existence. Pour Jacky, il fut un frère, un membre à part entière de sa famille. Pour Éric, une présence tutélaire, presque paternelle. « Il a peut-être été le père que je n’ai pas eu », confie-t-il.

Tous deux traversent leur adolescence portée par cette voix. « Il me donnait une force », dit Éric. « J’avais besoin de l’écouter, de le voirIl y avait quelque chose qui me déprimait chez lui, mais en même temps qui me donnait de la force. » Ce paradoxe l’a accompagné durant son adolescence, et même encore aujourd’hui. Jacky, lui, parle de Johnny comme d’un guide : « Il nous a montré une autre manière de vivre, de ressentir, de se tenir debout. C’est un dieu. On pratique Johnny tous les jours. »

Au-delà de l’idole : une fidélité vécue au quotidien

La passion ne s’est pas réduite à l’adoration d’un personnage public. Elle s’est inscrite dans les corps, les vies, les souvenirs. Chez Éric comme chez Jacky, l’identification ne s’est pas faite par imitation aveugle, mais par appropriation intime. « Je n’ai pas cherché à lui ressembler, juste à le faire vivre, mais je comprends la démarche des sosies » dit Jacky. Éric ajoute : « je voulais faire partie du clan, mais en restant moi-même » . Éric a parfois calqué certains éléments de l’apparence de Johnny :  tatouage, style. Pas par mimétisme, mais comme un ancrage. Il déplore les clichés qui entourent parfois les fans de Johnny : « On nous a dépeint comme des cassos, comme des clowns ». « Mais dans les fans de Johnny, il y avait tout le monde : de la personne simple jusqu’au milliardaire » précise Jacky.

Johnny est lié à leurs plus beaux souvenirs : un concert sous la pluie au Stade de France, une chanson qui réunit un couple… Parmi ses souvenirs marquants, Jacky évoque le Parc des Princes en 1993 : une entrée en scène millimétrée. Il se remémore aussi son premier échange avec l’artiste : « je ne sais même plus ce que je lui ai dit, j’étais tétanisé. ». Il nous partage sa chanson du moment «Le cœur en deux » .  Éric, lui, n’oubliera jamais le concert des Vieilles Canailles. Il disait au public ; « je m’en vais, mais je suis là. » Et un autre souvenir, plus intime : « j’avais emmené ma copine de 16 ans à la fête de l’Huma ; Il y a 15 ans, on s’est retrouvés et elle est devenue ma femme. Johnny a été un trait d’union. » Il évoque également un geste symbolique : un galet déposé sur la tombe de Johnny à Saint Barthélémy, avec inscrit dessus, quelque chose de Tennessee, accompagné de son prénom et de celui de sa compagne. « Un peu de moi là-bas, auprès de lui. »

Une présence intime, plus forte que l’absence

Le 6 décembre 2017, Johnny s’éteint. Et avec lui, c’est une part d’eux-mêmes qui vacille. Jacky est réveillé par son fils à 4 heures du matin. Éric découvre la nouvelle sur les réseaux. « Je me suis effondré », dit-il. « J’ai pleuré toute la journée. » Mais aucun des deux ne parle de fin. Car pour eux, Johnny n’est pas mort. « Je parle de lui au présent », affirme Jacky. « Il est toujours là. » Et si le décès de l’idole a transformé leur façon de vivre leur passion, il n’a pas affaibli leur attachement. Il a, au contraire, ravivé leur engagement. Jacky a fondé une association qui compte plus de 700 adhérents et 16 000 membres sur Facebook. Il y consacre six heures par jour, cinq jours par semaine. Il continue à organiser des événements, à animer des groupes, à échanger avec Laetitia Hallyday, à organiser des commémorations sur la tombe de Johnny à Saint Barth. Il a également dédié une pièce de son habitation à Johnny, presque un musée personnel. Éric, de son côté, continue de faire vivre Johnny intérieurement, dans ses choix, ses objets, ses souvenirs. Également, à travers une page Facebook « Fans de Johnny Hallyday », où il partage modestement des musiques. Il possède « 200 ou 300 CD dans sa cave », un trésor affectif qu’il transmet sans l’imposer.

Pourtant, plus le temps passe, et plus l’absence se fait sentir, confie Jacky : « son décès m’impacte de plus en plus ». Lui et d’autres fans ressentent l’impérieuse nécessité de faire vivre la mémoire de l’idole.

 Une histoire d’amour, à jamais ouverte

Johnny n’est plus, mais la communauté des fans, elle, demeure. Vivante, intergénérationnelle, rassemblée autour d’une œuvre qui se perpétue. De jeunes enfants rejoignent même l’association de Jacky. L’un d’entre eux, âgé de 12 ans, a rejoint le groupe après avoir entendu Johnny aux funérailles de son grand-père. Aujourd’hui il y fait même référence dans ses rédactions au collège. Jacky parle de communauté, Éric parle de culture « Johnny ». Rassembleur, fédérateur, Johnny devient alors un pont entre les générations, une mémoire partagée. Et si ses chansons sont toujours écoutées, c’est parce qu’elles parlent encore à ceux qui aiment, qui tombent, qui espèrent, qui se relèvent.

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